mercredi 25 septembre 2024

  Elle est d'un vert mat, laiteux, sans reflet sous le ciel mais intensément coloré. J'ajoute cette page au journal de la rivière.
Elle est ici dans une de ses plus grandes largeurs — juste avant le Pont Vieux, qui a quatre arches de pierre, depuis le moyen-âge, elle n'est plus très loin de sa confluence.
Ce vieux journal se laisse maintenant imaginer comme le pavement du square sous mes yeux : ses innombrables petits cubes de pierre ocres roux ou gris, orangés ou bleutés, piquetés de blanc, de rose, tachés de brun ou de rouille, dont aucun n'est identique à l'autre, formant des lignes courbes qui se suivent, s'organisent en vagues, en rémiges, en éventails qui semblent parcourus de brise et onduler comme une rivière. Quelques feuilles mortes s'y promènent, y font de courtes danses, de sèches musiques, des mimes arrêtés dans des positions fantasques. Le journal de la rivière a jeté toutes ses pages au vent, à l'eau, au sol, toutes différentes, toutes uniques mais toutes remplacées et renouvelées chaque jour. Pourtant elles n'ont que quelques mots toujours les mêmes pour définir leurs couleurs, leurs nuances, le regard qu'elles jettent au ciel, les pensées qu'elles reflètent.
Dario à côté de moi me surprend : cette couleur, dit-il, est due à la vie intense qui est au-dessous. Je n'y avais pas pensé.

Journal de la rivière